La mort de Nougaro, "nègre blanc" et poète du swing
PARIS, 4 déc (AFP) - Claude Nougaro, "nègre blanc" et poète du swing, l'homme qui maria jazz et java, rythmes métis et langue d'oc, funk et chanson française, est mort des suites d'une longue maladie jeudi à son domicile parisien.
Chanteur métis par excellence, Claude Nougaro n'aura pas été seulement un de ceux qui, après Charles Trenet et Jean Sablon, surent initier les jeunes générations au jazz.
Il avait su faire de même avec les musiques du monde, pionnier en France des rythmes brésiliens. C'est d'ailleurs à un des maîtres de la chanson carioca, Chico Buarque qu'il devait un des plus gros tubes de sa carrière, le fameux "Tu verras" (1977).
Il sera inhumé à Toulouse
Le "petit taureau" de Toulouse est mort dans l'appartement qu'il avait regagné après avoir été admis pendant plusieurs jours dans un hôpital parisien. Ses proches savaient que l'homme de l'étonnant come-back de "Nougayork", cet amateur de boxe, avait peu de chances de gagner son dernier combat.
Il sera enterré dans le courant de la semaine prochaine à Toulouse à une date qui sera précisée ultérieurement, a déclaré son agent, Charley Marouani. Une messe à sa mémoire sera célébrée lundi 8 avril à l'église Notre-Dame-de-Paris (10H30).
Le chanteur devait sortir un album courant avril chez Capitol. Il avait travaillé sur ce dernier enregistrement au studio Davoust, un des studios d'enregistrement les plus connus de la capitale, établissement fréquenté au même moment par Kool Shen, le rappeur de NTM, qui a loué en lui un homme "authentique".
Diseur de vers
Claude Nougaro avait effectué sa dernière tournée de chanteur en 2002. L'année suivante, cet amoureux des mots (Jacques Audiberti, Léo Ferré, Rimbaud constituait la sainte trilogie de ce bon vivant à l'accent ensoleillé) avait gratifié ses fans d'un spectacle comme "diseur de vers", les siens, extraits de son recueil "Les fables de ma fontaine".
Après un passage au théâtre des Bouffes-Parisiens, il avait effectué une tournée, qui s'était terminé à Andorre le 16 avril 2003, ultime prestation "live" d'une véritable bête de scène, un ring qu'il affrontait, démarche sautillante, façon Cassius Clay contre Sonny Liston, une attitude qui lui avait aussi valu le surnom de "petit taureau".
Sa dernière trace discographique, il l'aura laissée sur le dernier disque de "Sol En Cirque", enregistrement caritatif où il avait endossé le rôle de récitant, entouré d'une prestigieuse distribution aux côtés de Carla Bruni, Zazie, Maxime Le Forestier. Coïncidence, il s'y faisait le narrateur du combat, pour sa survie, d'un éléphant malade, "Big Mama".
Très nombreux hommages
La mort de Nougaro a suscité une très vive émotion en France. A Toulouse bien sûr, une ville qu'il ne s'était jamais résolu à quitter, où, de Dominique Baudis à Philippe Douste-Blazy, chacun n'a pas manqué de saluer l'homme et l'artiste.
A Paris encore, une ville qu'il n'avait cessé d'arpenter au gré de ses multiples déménagements : Jean-Jacques Aillagon, ministre de la Culture, a salué en lui "un grand artiste au style singulier, où la poésie des mots et la tendresse des rythmes tenaient une place importante". Jusqu'au président de la République Jacques Chirac, qui a honoré la mémoire d'"un maître de la chanson française".
L'homme qui n'avait cessé de vouloir tisser des liens entre les rythmes aurait sans doute apprécié le compliment des rappeurs Kool Shen (NTM) et Passi : "Par sa façon de placer ses rimes, c'était un des artistes les plus proches des rappeurs", a dit de lui l'ex membre de Ministère Amer.
04/03/04 17:05