Vamp avait retourné le problème dans tous les sens et ne voyait pas d'autre solution que de demander l'aide d'Avalon. Elle respira profondément, se leva gracieusement et s'approcha de la sorcière, toujours sous bonne garde.
- Tu n'as pas proposé de solution, remarqua Vamp en s'asseyant à ses cotés.
- Il me semblait que j'étais une prisonnière, par un membre de ton fan-club, répliqua Avalon l'air moqueur.
- Dans tous les cas, tu vas partager notre sort si on ne parvient pas à sortir de cette bulle. Si tu as une idée, c'est le moment de nous la faire partager.
Avalon sourit, l'air sardonique et leva les yeux vers les frondaisons dansantes qui les surplombaient.
- Rien ne m'aurait été plus agréable que de tenir votre sort entre mes mains, de savoir comment défaire cet enchantement. Je vous aurais fait patienter jusqu'à la dernière minute, j'aurais écouté, charmée, tes supplications et celles des tes amis. Je t'aurais peut-être même fait mettre à genoux devant moi, soupira-t-elle. Cela aurait pu être un moment intense et inoubliable.
- Mais ?
- Mais, je dois avouer que je ne connais pas ce sort. Cet enchantement m'échappe tout autant qu'à toi. Il va falloir que tu supplies quelqu'un d'autre.
- Vraiment ? Il me semble pourtant que ton côté sadique se réjouirait de me faire croire que notre destin est scellé, répliqua la mercenaire.
- Comme tu me connais bien, chère soeur, si j'avais un cœur, je serais émue par ces paroles. Crois-moi au pas, conclut-elle, je ne peux pas t'aider. Mais sache que je t'offre mon support moral, je ne tiens pas à finir comprimée dans une bulle temporelle, et encore moins avec toi. J'ai bien d'autres projets, dont certains nécessitent ta participation.
Vamp observa la sorcière avec attention. Celle-ci était suffisamment incontrôlable pour avoir décidé de ne lever le sort qu'à la dernière seconde. Cependant, dans le cas où si elle disait vrai, Vamp ne voyait pas comment ils pouvaient s'en sortir.
Elle se leva à regret, espérant qu'Avalon allait lui lancer une pique insidieuse sous entendant qu'elle pouvait résoudre ce problème mais la sorcière resta silencieuse, les yeux fixés sur un arbre à quelques mètres. Vamp s'éloigna lentement, la tête baissée.
Com et Hunter avaient regardé avec attention l'échange entre les deux femmes et avaient compris que la sorcière ne leur serait d'aucune aide.
- C'est dans ce type de situations que je me sens complètement inutile, soupira Hunter. Donnez-moi un ennemi à transpercer d'une épée ou un animal à traquer dans la forêt, je suis votre homme. Mais en face de la magie, je ne suis qu'un enfant, à peine plus doué qu'un bébé. Je suis comme Meryl, complètement dépendant des autres ! s'exclama Hunter.
- Meryl n'est pas … Com s'interrompit brusquement.
- Quoi ? demanda le traqueur, se retournant vers lui.
- Rien, j'allais dire que Meryl n'est pas qu'un simple bébé, c'est une personne à part entière.
- Bon sang, tu es devenu une vraie maman pour cette enfant, répondit Hunter en riant. Son humeur s'assombrit à nouveau et il se leva.
- Je ne peux pas rester sans rien faire. Dis à Vamp que je suis reparti suivre le sentier. Nous pourrons au moins savoir combien de temps il nous reste.
Com acquiesça, le regard pensif. Il pris soigneusement Meryl dans ses bras, vérifia que la couverture couvrait bien sa petite tête et alla porter le message d'Hunter à Vamp. Il s'éloigna enfin du groupe, s'isolant derrière un arbre étrange dont les branches se courbaient et replongeaient dans le sol, formant de petites arches couvertes de petites feuilles argentées. Personne ne les observait. Com s' assit en tailleur et plaça Meryl entre ses jambes. Le bébé ouvrit immédiatement les yeux et fixa attentivement Com alors qu'il sortait de son havresac la sphère chatoyante qui leur permettait d'aller de mondes en mondes. Il se concentra et entra en communication avec Meryl.
- Je me doutais que tu viendrais me parler, lui dit-elle tristement.
- Que sais-tu sur cette bulle ? lui demanda Com avec empressement.
- C'est un enchantement assez rare : magnus orbus. Il est très délicat à rompre, répondit doucement Meryl.
- Mais tu peux nous aider, demanda Com avec force.
Meryl hocha lentement la tête.
- Pas sous cette forme. Je ne peux maîtriser mes pouvoirs que sous forme d'adulte et vous ne pouvez pas attendre vingt ans.
- Mais, tu pourrais peut être me donner suffisamment d'informations pour que Tawi ou Avalon puissent détruire cet enchantement ? Ce serait possible même si tu es un bébé, non ?
- Non, Com. Il faut posséder des connaissances qui ne peuvent se transmettre par la parole, je suis désolée.
- N'y a-t-il aucun moyen de s'en sortir ? S'il te plait ? supplia Com. La sphère te permet de maîtriser les distances et le temps, elle pourrait nous sortir de cette bulle, non ?
- Je ne peux qu'observer le monde à travers la sphère, c'est un artefact passif et non actif. Je suis désolée, Com mais je ne peux rien faire pour vous sous cette forme.
- Conclusion, tout est perdu, soupira Com. Il s'adossa au tronc d'arbre et leva la tête vers le feuillage qui bruissait doucement. Il avait pendant quelques secondes espéré que Meryl pourrait tout arranger. Mais elle était bloquée par son état d'enfant. Cependant …
- Attends ! s'exclama-t-il. Tu as bien dit : « sous cette forme » ? Pourrais-tu retrouver ta forme adulte ?
- Cela serait quasi impossible. La magie ne me permet pas de réaliser n'importe quoi. Pour redevenir adulte, il faudrait que je vole l'énergie vitale d'un être humain. Cela violerait tous mes principes, affirma Meryl avec force.
Com ferma les yeux et inspira une grande bouffée d'air pur. Il bloqua sa respiration, essaya d'ordonner les folles pensées qui se bousculaient dans sa tête. Il expira lentement, clarifia ses idées. Il fixa Meryl et lui dit très calmement.
- Et si j'étais volontaire ?
- Pardon ? Volontaire pour quoi ?
- Et si je te cédais ma force vitale ? Tu pourrais redevenir toi-même et nous sortir de ce guêpier, expliqua Com, soudain animé d'un espoir nouveau.
- Il n'en est pas question ! Cela causerait ta mort, Com ! Ce n'est pas un enchantement mineur où tu resterais alité quelques semaines, le temps de récupérer ! Je ne peux redevenir moi-même que si je vole ton essence vitale, faisant disparaître tout ce que tu étais et tout ce que tu aurais pu être. Ton souvenir même serait effacé progressivement de la mémoire de tes amis.
- Et quelle serait l'alternative, Meryl ? Mourir dans quelques heures quand cette bulle nous aura tous digéré ? Voir mes amis se battre jusqu'au bout, épuiser leurs forces à chercher une solution ? Nous n'avons pas le choix, cria-t-il. JE n'ai pas le choix. Qu'est-ce que ma mort si elle peut sauver plusieurs vies ?